Lancement de la gamme Acuvue Abiliti : l’interview !

Dr Joël Pynson

C’est au cours du récent congrès de la Société Française d’Ophtalmologie que nous avons pu rencontrer l’équipe Johnson & Johnson Med Tech, au sujet du lancement en France de la gamme de lentilles destinées à freiner l’évolution de la myopie, Abiliti.

Ont répondu à nos questions, Lisa McAlister, Marketing et Stratégie EMEA, Vincent Perrin, Directeur Général France et Benelux, et Christophe De Combejean, Senior Marketing Manager France et Responsable Myopie France.

 

CONTAGUIDE : Acuvue Abiliti 1-Day Soft Therapeutic Lenses et Acuvue Abiliti Overnight Therapeutic Lenses. Ce sont des noms de lentilles vraiment très longs…

Christophe De Combejean : Il s’agit du nom de marque complet, les noms qui sont utilisés en pratique quotidienne sont simplement Acuvue Abiliti 1-Day et Acuvue Abiliti Overnight.

CONTAGUIDE : La lentille Abiliti Overnight est approuvée aux États-Unis par la FDA pour la gestion de la myopie depuis 2021. Est-ce la seule lentille de ce type à avoir cette approbation ?

Christophe De Combejean : Oui, c’est la seule. Toutefois, la lentille étant commercialisée en partenariat avec Menicon, ce laboratoire a aussi l’approbation de la FDA. Rappelons que cette lentille est utilisée depuis une quinzaine d’années en orthokératologie avec d’excellents résultats.

Vincent Perrin : Toutefois, en France, là où nous pouvons apporter le plus de valeur avec une solution disruptive, c’est plutôt avec Abiliti 1-Day qui se différencie nettement de ce qui peut exister sur le marché aujourd’hui.

CONTAGUIDE : Pourquoi alors lancer les deux lentilles en même temps ?

Christophe de Combejean : Parce que nous sommes convaincus de la nécessité d’apporter à la fois aux patients et aux professionnels un maximum d’options thérapeutiques. La lentille souple pourra répondre à certains besoins, et la lentille d’orthokératologie à d’autres. C’est aussi ce qui est ressorti des réunions avec notre comité scientifique en France, qui a insisté sur le fait qu’il n’y avait pas une option idéale unique dans l’arbre décisionnel pour la prévention de la myopie.

Lisa McAlister : Une solution unique ne conviendrait pas en effet à tout le monde. Par exemple, chez le jeune enfant, la manipulation d’une lentille souple peut être difficile, alors que les parents peuvent aider à la mise en place d’une lentille d’orthokératologie. Il y a un rapport efficacité/style de vie pour chaque patient.

CONTAGUIDE : Pour les professionnels, n’y a-t-il pas une différence importante entre prescrire une lentille souple et une lentille d’ortho-K ?

Lisa McAllister : Bien sûr un professionnel peut avoir une préférence, mais nous souhaitions avoir une lentille d’orthokératologie très facile à adapter : il suffit simplement d’avoir au cabinet un bon topographe cornéen.

Christophe De Combejean : Pour compléter cette réponse, certains spécialistes de la myopie étaient réticents à l’idée d’adapter une lentille souple en hydrogel chez des enfants. L’arrivée d’une lentille en silico-hydrogel aura sans doute un impact sur le choix des options possibles.

CONTAGUIDE : Pensez-vous qu’en France les adaptateurs sont dans l’ensemble ouverts à l’orthokératologie ?

Christophe De Combejean : Les cabinets français sont très bien équipés, mais le problème vient plutôt de l’organisation, du parcours patient et de la formation des équipes. De notre côté nous proposons un logiciel d’adaptation FitAbiliti qui rend très facile la prescription et qui permet de fluidifier le parcours.

CONTAGUIDE : Revenons à Abiliti 1-Day. Est-ce que les technologies utilisées pour cette lentille ont été développées en interne chez Johnson & Johnson ?

Lisa McAlister : Oui, entièrement. Nous développons des lentilles pour la correction de la myopie depuis plus de 15 ans et nous nous intéressons à la prévention de la myopie depuis très longtemps. Le design de la lentille a été spécialement conçu pour la prévention de la myopie chez l’enfant, et il est totalement différent de ce qui existe ailleurs. Nous sommes restés discrets sur ce design, car les études cliniques sont toujours en cours.

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La technologie RingBoost

Dans le cadre du congrès de la SFO, Johnson & Johnson a organisé le 5 mai dernier un symposium sur la prévention de la myopie chez l’enfant. On a pu ainsi en savoir plus sur la technologie RingBoost de la lentille Abiliti 1-Day, grâce en particulier aux interventions des Dr Monica Jong, en charge de l’éducation professionnelle chez J&J et maître de conférences à l’Université de Sydney, et du Pr Langis Michaud, Professeur à l’Université de Montréal, qui a testé la lentille.

Selon le Dr Jong, plusieurs constatations ont conduit au développement de la technologie RingBoost :

- dans une lentille multifocale avec vision de loin centrale, l’addition périphérique entraîne une perte moyenne d’acuité visuelle qui atteint un maximum pour une addition de +3,00 D. Mais curieusement, si on continue à augmenter la puissance d’addition en périphérie, on constate non pas une aggravation, mais une amélioration de l’acuité visuelle, et ce jusqu’à des valeurs d’addition pouvant aller jusqu’à +10,00 D.

- ceci s’explique par le fait qu’un anneau réfractif de forte puissance a pour effet de défocaliser les rayons non co-axiaux. Ainsi, le halo autour de la macula est minimisé et l’acuité visuelle préservée.

La lentille Acuvue Abiliti 1-Day a deux anneaux concentriques de puissance +7,00 D, et un point central de +10,00 D (central dot boost). Les deux anneaux de 7,00 D ont des points de focalisation en dehors de l’axe optique, ce qui renforce l’effet du traitement tout en préservant la qualité de vision.

Le Dr Michaud a également rappelé les mécanismes expliquant la freination de la myopie chez l’enfant. Tout se passe au niveau de la rétine, et en particulier dans la région maculaire autour de la fovéa. Le défocus myopique dans cette région provoque l’apparition de bio modulateurs qui vont entraîner un relâchement de la choroïde qui va s’épaissir. Cette augmentation d’épaisseur choroïdienne entraîne une réorganisation de collagène de la sclère, et l’œil va alors résister à l’élongation.

Il y a d’autre part un effet dose : plus le défocus myopique est important, plus l’effet sur la freination myopique est important.

La lentille Acuvue Abiliti 1-Day combine donc deux caractéristiques complémentaires : une action périfovéale et une forte défocalisation grâce à ses anneaux de +7,00 D et son point central de +10,00 D.

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CONTAGUIDE : La lentille Acuvue Abiliti 1-Day a été conçue spécialement pour les enfants. Quelles sont ses caractéristiques ?

Lisa McAlister : D’une part c’est une lentille en silico-hydrogel pour une meilleure oxygénation de la cornée. D’autre part, son diamètre est de 13,80 mm, soit légèrement inférieur au 14,30 mm de la lentille pour adultes. Enfin, la technologie RingBoost est conçue pour maximiser l’effet thérapeutique tout en préservant une bonne acuité chez l’enfant.

Vincent Perrin : Ce dernier point est important. On a bien vu lors des essais et des études cliniques que l’adhésion de l’enfant à son traitement passait par une bonne acuité visuelle pour les activités du quotidien.

Christophe De Combejean : Absolument. Dans les études, les courbes d’acuité visuelle sont comparables dans le temps avec les lentilles contrôle, et les scores de satisfaction sont également très similaires.

CONTAGUIDE : Avez-vous comparé les résultats d’Acuvue Abiliti 1-Day avec les études portant sur les verres de lunettes freinateurs de la myopie ?

Lisa McAlister : La difficulté pour la réalisation de ce type d’étude comparative, c’est qu’on a beaucoup de mal à connaître précisément le temps de port des lunettes. Mais nous travaillons sur une méta-analyse de ce qui a été publié sur le sujet pour pouvoir se comparer. D’excellents résultats ont été publiés pour la freination de la myopie par certains verres spécifiques, mais la comparaison doit aussi inclure des données sur l’acceptance et la qualité de vie.

CONTAGUIDE : Beaucoup d’études impliquant des verres de lunettes sont faites en Asie et principalement en Chine, donc sur des yeux asiatiques. Où faites-vous les études pour les lentilles Abiliti ?

Lisa McAlister : Nos études sont multicentriques et nous incorporons de jeunes patients caucasiens et asiatiques dans différents pays. Il faut noter ici que dans nos études nous ne cherchons pas à comparer différentes modalités de traitement, mais à déterminer ce que nous appelons le CARE factor, c’est-à-dire la réduction absolue cumulative d’élongation axiale (Cumulative Absolute Reduction in Axial Elongation).

CONTAGUIDE : Vous présentez d’excellents résultats à 6 mois, mais quand aurons-nous les résultats à un an et plus ?

Lisa McAlister : Les résultats à un an et 18 mois sont en cours de publication, et nous aurons les résultats à 2 ans très prochainement.

Christophe De Combejean : Les résultats à 6 mois montrent déjà l’efficacité du système. Nous les publions, non pas pour dire que c’est suffisant, mais pour montrer que dès le début du traitement il y a une efficacité notable, que les enfants savent rapidement manipuler les lentilles, et qu’elles sont bien tolérées.

CONTAGUIDE : Pensez-vous que les parents sont suffisamment informés sur les possibilités de freiner l’évolution de la myopie ?

Lisa McAlister : Il y a beaucoup d’informations disponibles à ce sujet, mais il est difficile de savoir où les trouver et qui croire. Nous devons rappeler que la myopie est une maladie qui évolue, qui peut entraîner des complications, et nous avons donc un devoir d’éducation concernant les différentes options de traitement. Nous faisons partie de la Global Myopia Awareness Coalition, avec d’autres représentants de l’industrie et des sociétés savantes. Pour le moment cela ne concerne que les États-Unis, le Canada et l’UK, mais des extensions sont prévues. C’est une initiative forte et non commerciale.

CONTAGUIDE : La situation en France est-elle différente de celle observée dans d’autres pays européens ?

Christophe De Combejean : Oui, en France, la prescription des lentilles est réalisée par les ophtalmologistes, et il y a un intérêt médical à la freination de la myopie. De plus les cabinets d’ophtalmologie sont très bien équipés pour la biométrie ou la topographie. Enfin et surtout, il s’agit d’enfants, et nous sommes heureux que la prise en charge soit médicale.

Vincent Perrin : On en revient au fait que la myopie est une maladie qui nécessite un suivi par les ophtalmologistes. C’est pourquoi nous lançons les lentilles Acuvue Abiliti d’abord en France. Pour les lentilles de contact, c’est un moment important : on passe de la correction optique à la prévention et au traitement.

Lisa McAlister : Pour en revenir à l’éducation, nous mettons en place une équipe dédiée qui participera aux congrès professionnels et qui s’adressera aussi aux professionnels de façon plus individuelle.

Christophe de Combejean : Ce sera notre mission en France avec une équipe expérimentée et 3 objectifs : 1. Éducation et science, avec les congrès et la collaboration avec notre comité scientifique composé d’ophtalmologistes experts français, 2. Accompagnement des ophtalmologistes dans l’activité de prévention de la myopie, et 3. Faire connaître les lentilles Acuvue Abiliti et leurs technologies.

Lisa McAlister : Nous souhaitons en fait que le management de la myopie devienne le standard de traitement de cette affection.

Christophe de Combejean : Et même si tous les ophtalmologistes n’ont pas le même intérêt pour les lentilles de contact en France, nous pensons que la mise à disposition de solutions performantes et sûres pourra élargir le nombre d’adaptateurs.

 

 

 

 

 

 

 

 

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